Sciuna // Constat inital
Notre planète / l’ameublement
Nous sommes à un tournant historique, notre planète est arrivée à son point de rupture ! L’urgence écologique est notre réalité. Pour cela, nous devons tourner ensemble la page de l’anthropocène. Celle-ci se caractérise par l’impact des activités humaines comme principale force de changement sur terre, surpassant les forces géophysiques.En 2021, 3.29kt d’éléments d’ameublement ont été mises sur le marché français tout en générant 1.25kt de déchets d’éléments d’ameublement (DEA) dont 10% ne sont pas valorisés (Source ADEME rapport 2021). Le consumérisme frénétique lié à la mode et aux tendances participe à l’augmentation de nos déchets et de nos impacts environnementaux. Conscients de la crise et de l’urgence écologique à laquelle nous faisons face, les designers ont une responsabilité face aux nombreux objets manufacturés mis sur le marché chaque année. L’une des pistes de réduction de nos impacts environnementaux, liés à l’ameublement, peut-elle résider dans la gestion de nos déchets en se basant sur la philosophie du « Cradle to Cradle » (créer et recycler à l’infini)?
Analyse et constat
Le mouvement actuel, Material Driven Design, a l’ambition de changer le statut de nos déchets en les valorisant en nouvelle matière première par l’exploration matérielle.Déchets > nouvelle matière première > objets V1 > collecte > recyclage > objets V2,…Aujourd’hui il n’est malheureusement pas possible de mettre en place une filière nationale de recyclage sans avoir 10 tonnes/an d’un même déchet (source Veolia). La création récente de ces nouvelles matières se heurte à la collecte lorsqu’elles sont commercialisées et parsemées sur l’ensemble de notre territoire. Il n’est donc pas possible, à ce jour, de collecter ces nouvelles matières pour les recycler. De plus, seul le fabricant est capable de recycler sa nouvelle matière. De ce fait, même en créant une nouvelle matière recyclable, le cycle de vie n’est pas aussi vertueux que désiré. Il ne faut pas que cette faiblesse actuelle anéantisse tous ces efforts mais au contraire qu’elle puisse être la voie d’un modèle à améliorer.
Axe de recherche
En tant que designer engagé et dans le contexte de raréfaction des ressources non renouvelables, j’ai décidé d’être acteur du mouvement Material Driven Design en transformant nos déchets en future matière première. L’analyse du cycle de vie de ce nouveau modèle m’a permis d’orienter mes recherches responsables vers la création d’une matière biodégradable, compostable et recyclable. Ces caractéristiques permettront de mieux adapter la fin de vie en fonction du contexte. Dans le cas où la recyclabilité générerait plus d’impacts environnementaux, la biodégradabilité ou la compostabilité y seront préférées.
La matière Sciuna Mes années de recherches et d’explorations de nouvelles plasticités m’ont permis de définir une nouvelle matière constituée d’une charge, les coques de fruits secs Français, qui sont des ressources naturellement renouvelables tous les ans. Un de nos partenaires est passionné d’arboriculture et a planté, en 2019, 40 hectares de noisetiers en Ile de France pour commercialiser la noisette sous toutes ses formes. Il se réjouit que le sortant de sa casserie, la coquille de noisettes, puisse être valorisée et transformée en objets du quotidien. Cette charge a été sélectionnée pour sa résistance mécanique et sa capacité à se dégrader naturellement dans le sol. Ce choix engagé a également été motivé par l’adaptation agronomique naturelle du noisetier en Ile de France. Pour lier la charge, de multiples essais ont conduit à retenir les deux composants naturels ayant le plus faible impact environnemental. Parmi les propriétés avantageuses, un des composants se crée par l’absorption de CO2.Le scenario d’éco-fabrication a été pensé avec une approche holistique pour réduire l’impact environnemental. D’une part, l’identification de la charge a été sélectionnée pour être un gisement pérenne pour une production durable. Et de l’autre, le processus de fabrication s’est voulu frugal en optant par le façonnage à froid, sans cuisson, permettant ainsi une réduction de la consommation d’énergie et des impacts qui y sont liés.Ce projet tourné vers l’avenir permet d’interroger de manière critique notre façon de consommer et de concevoir afin d’anticiper les défis futurs pour habiter notre monde de manière plus soutenable.